Ancêtres de Bresse et  de Savoie

Le curé THEVENET en guerre contre les repas de dîmes

Les repas de dîmes

Par une sorte de compensation les dîmiers devaient donner "un dîner de dîme" rassemblant une personne par feu. Ces repas, occasion de réjouissances et de beuveries furent supprimés sous l'influence de la réforme catholique et remplacés par une contribution volontaire au profit des réparations et de l'embellissement de l'église.

    En juin 1721, Jean Gaspard THEVENET alors  curé d'Évires, décide rentrer en campagne contre les repas de dîmes. Pour lui, ces repas occasionnent de grands frais, de gros excès (jurement- blasphèmes - imprécations - querelles - coups violents). Il  souhaite changer ces repas en réparations et ornements comme cela se faisait de plus en plus dans les autres paroisses.

       Pour ce faire Jean Gaspard THEVENET requiert le notaire Claude Rodolphe DUFOUR de la Roche.

      Le curé THEVENET décide de passer de "village" en village, de maison en maison pour obtenir le consentement de ses paroissiens. Il choisit cette solution plutôt que de traiter le problème  en assemblée car il craint l'influence néfaste de certains de ses paroissiens qu'il connaît pour être "turbulents qui ne respirent qu'à la goinfrerie et qui par leur trouble et leur peu de religion auraient détourner les biens intentionnés à donner un si salutaire consentenment".

Le curé THEVENET, le notaire,  le vicaire François DECOUZ, et Claude François DUPENLOUP parcourent les villages de Daudens, La Côte, Charnier (Charny) -Fresnes - Montbéné - bois Noir - Corbex . Ils obtiennent environ 85 consentements.

Le Révérend THEVENET évalue à 1/10ème les paroissiens omis peut-être correspondent-ils aux paroissiens "turbulents". Parmi les paroissiens consentants figurent Balthazard CARRIER  , fils aîné de Jean-Baptiste qui consent pour son père.

Comme le curé le craignait, le dimanche suivant cette visite, les paroissiens l'attendent à la sortie de l'office et reviennent tous sur leur consentement. Par conséquen, il décide de frapper fort et envoie un placet (Écrit adressé à un roi, à un ministre pour se faire accorder une grâce, une faveur.) pour exposer ses déboires.

Le placet du curé THEVENET

Pour supprimer l'abus des repas de dîme

Sire,

Supplie très humblement Rd Gaspard THEVENET curé de la paroisse d'Évires en Bornes diocèse de Genève.

   Disant que dans la dite paroisse, il s'est introduit dès longtemps une coutume abusive, criminelle et scandaleuse d'un repas que les fermiers de dîmes donnent à environ 120 chefs de familles dans lequel repas se font des débauches, querelles, se commettent des blasphèmeset autres excès dont Dieu est grièvement offensé: l'on a été contraint plusieurs fois à la fin de ces repasd'en emporter chez eux pour s'être trop chargé de vin et de viande et qui ensuite ont été malades et comme ces sortes d'assembléesne se font que dans des jours de fêtes et dimanches, ces saints jours en sont profanés.

         Le dit suppliant , gémissant à la vue  de ces désordressouhaiterait pour la gloire de Dieu, pour l'honneur de la religionet pour le salut du peuple qui lui est confié, abolir un abus si criant ce qu'il a déjà vouluentreprendre en représentant à ses dits paroissiens que ce serait une chose bien chrétienne de convertir les frais de ces repas en des réparations et ornements de leur église et que l'argent serait mis dans un troncfermant à deux clésdont le dit curé en aurait une et le procureur d'église l'autre, qu'on y toucherait point sans demander le consentement de la paroisse dès qu'il y aurait des réparations à faire. Les mieux intentionnés qui sont en plus grand nombre que les autres y ont consenti de bon coeur mais ceux qui préfèrent la débauche à la gloire de Dieu et aux salut de leurs âmes s'y sont formellement opposés.

Ce que le dit suppliant n'a pas cru mieux faire pour venir à bout d'un si pieux dessein que de recourir à l'autorité de votre majesté pour soumettre le reste des paroissiens de bonne oeuvrecomme on l'a déjà fait dans plusieurs autres endroits du même diocèse.

Curé THEVENET

La fin des repas de dîme

Le 31 août 1722, une ordonnance de Mr l'Intendant  général RICCARDI est envoyée pour supprimer les repas de dîmes

Nommé par le roi, l'intendant général sera toujours un Piémontais à l'exception de VIGNET DES ETOLES en 1784/1785. Installé au chateau de Chambéry, il dispose à l'instar des intendants français, des pouvoirs forts étendus dans les domaines des finances, de la fiscalité, des travaux publics, des ponts et des chemins et de la police au sens très large que ce mot revêt,à l'époque concernant non seulement la répression des troubles mais aussi leur prévention. C'est à ce titre qu'il intervient dans le différend qui oppose le curé d'Évires à ses paroissiens.

Cette ordonnance du 31 août 1722, interdit le repas de dîme sous peine de 100livres d'amende. La somme à quoi se montait les frais de repas sera employée au bénéfice des pauvres. La destination sera faite par le curé et les syndics de la paroisse.

Cette ordonnance sera publiée 3 dimanches de suite afin d'éviter les réclamations.

Elles seront publiées les 6 - 8 - 13 septembre 1722

Le 22 novembre 1722, la communauté d'Évires se soumet à l'ordonnance.

19 chefs de familles au Corbex

20 chefs de familles au Bois Noir

11 chefs de familles au MontBéné

9 chefs de familles à Daudens

9 chefs de familles à Charnier

13 chefs de familles au Fresnes

4 à la Côte

= 85 chefs de familles, sur 120, les mêmes que le Rd curé avait déjà réussi à convaincre. Il y a donc 35 récalcitrants.

 

L'ordonnance qui met fin définitivement aux repas de dîmes

Le 4 janvier 1723 Ordonnance de Mr GASCO intendant de la province du Genevois

Taxe sur les frais du repas que les fermiers de la dîme étaient en coutume de donner en nature aux cher=fs de famille de chaque hameau une fois l'année à 6 sols par tête.

Les dits fermiers devront payer à l'égard de l'année dernière après que commandement leur sera fait entre les mains du Procureur de l'église député par le peuple et par le Rd curé quant à l'avenir le montant du dit repas se paiera par les dits fermiers entre les mains du même procureur à la fête de notre Dame de septembre (=8 septembre).

Autre déclaration que les fermiers de l'hameau du MontBéné ne seront points exempts de payer le prix du repas à forme de la taxe susdite pour le nombre de chefs de familles dudit hameau entre les mains dudit procureur pour l'année dernière quoiqu'ils aient déjà donné le repas en nature aux dits chefs et cela parce qu'ils l'ont donné au mépris de la dite ordonnance.

Date de dernière mise à jour : 06/04/2021

Ajouter un commentaire